ZEROSECONDE.COM: juillet 2012 (par Martin Lessard)

ZEROSECONDE.COM

Impacts du numérique sur la communication, notre société, nos vies.

Vos photos qui peuvent vous dénoncer

C’est l’histoire d’un employé dans un Burger King qui a téléchargé en ligne une photo où l’on voit ses pieds dans deux plats de laitues. 


 «Voici la laitue que vous mangez chez Burger King» écrit-il anonymement sur le réseau 4chan, un site de partage de photos.

Il est peut-être un employé frustré, mais il n'est pas un employé futé. Il a oublié de retirer les méta-données qui permettent de géolocaliser une prise de vue. 

Déroulement

  • Lundi 16 juillet à 11:38pm la photo est déposée sur 4chan.
  • 9 min plus tard quelqu’un avait déjà retrouvé la ville (Mayfield Heights, Ohio)
  • 3 minutes après quelqu’un avait trouvé l’adresse du Burger King
  • Un autre 5 minutes de plus et voilà qu'on avait déjà contacté les journalistes 
  • Exactement 20 minutes après que la photo a été mise en ligne, un message était envoyé à Burger King, c'en était fini...
Le lendemain matin, le manager responsable de l’ouverture était déjà au courant et l’employé était identifié! 


Morale? 
Si vous voulez faire le malin, ne postez pas n’importe où vos photos avec des métadonnées...
Et même si vous ne voulez pas faire le malin, vos photos en lignes sont peut-être des mouchards qui indiquent où vous avez pris ces photos de chalets, de maison, de votre famille...

Le bras politique de Wikipédia?

La confiance collective que nous portons en l'encyclopédie ouverte qu'est Wikipédia lui donne un certain pouvoir auquel on ne s’attendait pas. J'ai effleuré le sujet vendredi sur le blogue Triplex de Radio-Canada (Le pouvoir d’une encyclopédie). Reprenons un tout petit peu plus en profondeur ici.


Mon petit clin d'oeil à Diderot, D'Alembert et Wales
C'est partie d'une nouvelle de la semaine passée.

On apprenait que la partie russe de Wikipédia avait fermée pendant une journée pour protester contre l’initiative du gouvernement russe de censurer Internet dans le pays (en permettant de censurer et de fermer tout site Internet jugé « illégal » en créant une liste noire, à la manière du gouvernement chinois). 

Ça nous rappelle cette fermeture partielle de Wikipédia (anglais), en janvier, en protestation contre le projet de loi SOPA. 

Or, le fondateur du site, Jimmy Wales a répété jeudi dernier que l'encyclopédie n’hésiterait pas à recommencer, s’il le faut, pour protéger l’accès libre à l’information en ligne que menacent ces multiples lois gouvernementales qui tentent partout dans le monde de museler Internet. 

Il Elle a donc recommencé en Russie. (MàJ Voir note pour la correction)

Sans vouloir exagérer la portée politique de ce geste, il me semble que nous avons là, tout de même, un rapport de force intéressant entre les gouvernements et l'encyclopédie qui n'est pas anodin. 

Wikipédia continue-t-elle un combat commencé quelque deux cent cinquante années auparavant?

Savoir, c'est pouvoir 
Le projet d'encyclopédie, tel que conçu par Diderot et d'Alembert, avait un but résolument révolutionnaire. Le Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, publié entre 1751 et 1772, offrait des définitions de mot qui avaient une connotation politique et s'inscrivait dans la révolution intellectuelle de l'époque, les Lumières. 

Le XVIIIe siècle a été marqué par un rationalisme venu du renouveau philosophique, une pensée axée sur la raison (qui doit beaucoup à Kant et à Descartes). On s'accorde à dire comment cette encyclopédie a préparé la Révolution française de 1789 en tentant de changer la façon dont les gens pensent.

La filiation avec Wikipédia que je vois tient surtout au rôle qu'une encyclopédie peut jouer dans la sphère politique. Je ne crois pas qu'il y ait eu d'encyclopédie qui se soit approchée autant de la scène politique que Wikipédia depuis celle de Diderot et d'Alembert.

Touchez pas à mon encyclopédie
Quand des projets de loi touchent directement la neutralité et l’accès aux contenus en ligne, Wikipédia se réserve maintenant le droit de réagir et de faire enrager des millions d’utilisateurs en bloquant l'accès à son contenu pendant une journée.

Il est possible ainsi de faire passer un message à tout un pan de la population qui est justement très sensible à l’accès et à la diffusion des savoirs. Quand Wikipédia ferme, c’est le spectre de la noirceur qui s’annonce. Aucun gouvernement d’un pays démocratique ne souhaite ce genre de publicité.

Je concluais ainsi dans mon autre billet: « "Du pain et des jeux" , disait-on en haut lieu pour conserver la quiétude dans la cité. Faudra-t-il bientôt ajouter : " …et Wikipédia?" »

Il me semble encourageant que retirer l'accès à une encyclopédie devienne un "sujet chaud" socialement parlant. Que retirer l'accès à la connaissance soit un irritant majeur est en soi un signe de bonne santé démocratique!

Je sais, donc je suis
On pourra penser ce que l'on veut de Wikipédia,  mais en tant que fille du web, et donc devant la surabondance des informations et des savoirs en ligne, elle reprend les réflexions qui avait déjà court à l'époque de l'Encyclopédie et Diderot et d'Alembert à propos de l'hiérarchie des connaissances, de son accès et de son partage.

À la manière des encyclopédistes, les wikipédistes confrontent aussi un certain ordre des choses. Peut-être pas comme l'auraient fait les philosophes de l'époque (et surtout pas de façon aussi anonyme et collective que pour Wikipédia), mais en rendant accessible une connaissance du monde, du très scientifique au plus trivial, on voit une société civile qui s'autonomise davantage par rapport à la sphère politique.

Souffrir pour savoir n'est plus une fatalité
Les détracteurs de Wikipédia, et a fortiori de ce billet vantant un certain pouvoir politique pour cette encyclopédie en ligne, me semblent en général tomber dans deux a priori qui les empêchent de bien apprécier sa portée.

Leurs deux objections n'ont plus cours en cette ère de surabondance d'information et d'ubiquité de l'accès:

A) il faut de l’effort pour apprendre, de la peine et de la fatigue pour assimiler
B) on apprend qu'avec les maîtres, en les imitant, et avec du travail, par l’expérience

La proposition païenne de «tout savoir en un clic» heurte leur sensibilité héritée du judéo-christianisme.

Le travail d'apprentissage doit être laborieux et solitaire, corvée dont le fruit doit se mériter dans la douleur et la culpabilité, lots des Hommes hors de l'Eden.

C'est à mon avis une façon révolue de concevoir l'accès et l'assimilation de la connaissance.

La compréhension est, quant à moi, d’abord et avant tout, un acte intersubjectif. Le réseau a drastiquement réduit la difficulté d'accéder au savoir et de le partager.

Wikipédia n'est pas seulement une accumulation d'information, c'est aussi un contexte nouveau. Elle radicalise la simplification et la démocratisation des savoirs. Elle offre une rapidité et une facilité de consultation des liens qui mène à une autonomie de jugement pour celui qui explorent ces liens.

Ce jugement vient moins des "idées révolutionnaires" dans le texte, que de la liberté de penser par soi. 

«Je décide quel article lire, quand et comment. J'y fait mes propre ajouts au besoin -- ou du moins je sais que j'en ai la possibilité. Avec Wikipédia, je trouve la réponse à des questions d'ordre général (et même particulier) qui fait de moi un citoyen plus éduqué, donc plus impliqué»

Fermer Wikipédia est un retour en arrière pour ces gens. Et ce geste politique, cette fermeture, en le confrontant à un projet de loi, au USA ou en Russie, montre quel retour en arrière leur est potentiellement proposé par un gouvernement.

Le bras politique de Wikipédia fait ses premières musculations. Le temps dira s'il peut faire à répétition de tels bras de fer...

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Je suis bien curieux de connaître ce que vous inspire cette piste de réflexion.

(je mettrai un lien vers votre blogue à la fin du billet si vous désirez poursuivre la conversation ailleurs).

Mon bilan du #fmlf2012

De retour du Forum mondial de la langue française, où j'ai pu animer deux activités sur le rayonnement de la culture francophone et de la langue française dans l’univers numérique, voici mon bilan.

Pour les auditifs, j'ai donné une entrevue sur le sujet à la radio de Radio-Canada (émission La Sphère)
Le nouvel univers numérique

Les questions entourant spécifiquement le « nouvel univers numérique » ont été débattues au Forum durant la journée de jeudi. Le numérique est l’une des 4 grandes thématiques du Forum (les autres étaient l’économie, la culture et la diversité linguistique). Normal que le numérique soit présent. Comme il s’insère maintenant partout dans la société, parler de la langue française sans parler de numérique n’a pas de sens.

C’est d’ailleurs de cette façon que le conférencier principal, le professeur Doueihi a présenté la place du numérique dans la francophonie. (Milad Doueihi est titulaire de la Chaire de recherche sur les cultures numériques à l’Université Laval. Il a été ma plus belle découverte du Forum. Érudition, vulgarisation et avec une bonne vision synthétique pour résumer le passé et nous projeter dans l'avenir).


M. Doueihi a commencé en rappelant que le numérique est arrivé si vite qu’on a de la difficulté à bien voir ce que c’est. Est-ce un outil? Une technique? Il a bien identifié qu’aujourd’hui c’est aussi (sinon plus) quelque chose comme une nouvelle forme de sociabilité, ce qu’il appelle une sociabilité numérique.

Cette sociabilité numérique est une nouvelle manière d’être ensemble, et donc voilà pourquoi ça concerne la francophonie. La francophonie a donc un rôle à jouer dans le numérique.

Le rôle que la Francophonie peut jouer


Puisque le monde anglophone domine grâce aux outils et aux plateformes que l’on retrouve partout en ligne, M. Doueihi, dit qu’il faut non pas trop se concentrer sur les contenants, mais bien sur les contenus. Il faut à tout prix assurer la visibilité du contenu francophone: les rendre repérables, trouvables, partageables.  Il faut développer et maitriser des stratégies de visibilité efficaces. 

Il a raison, 5% des contenus en ligne est en français, c’est beaucoup, mais pas assez pour qu’on les retrouve tout seuls. Sinon, un à un, les francophones vont se noyer dans du contenu non francophone. La Francophonie (avec un F majuscule, on parle de l'Organisation), en tant que représentant, a un rôle de catalyseur à jouer. Mais elle ne trouvera pas le rôle facile.

Crise de la représentation



M. Doueihi dit que le défi est doublé d’une crise de la représentativité. Les modèles de la représentation classique ne tiennent plus en ligne. 


On est passé d’un modèle hérité de la tradition siècle des lumières, basé sur la représentation de la volonté générale, c'est-à-dire qu’on élit des gens qui eux sont mandatés pour parler en notre nom et nous représenter. Aujourd’hui cette sociabilité numérique fragilise le modèle de la représentation traditionnelle. Le numérique opère une rupture dans la société.

Avec le numérique, il y a un retour à la base, vers l’horizontal, où les gens se représentent eux-mêmes.

Ce qui «délégitimise» les institutions qui disent nous représenter. (C'est de la musique à mes oreilles. Les lecteurs de mon blogue savent qu'on y discute ici depuis 2004 de ces mutations politiques, culturelles et sociales).


La Francophonie, selon M. Doueihi, doit surtout encourager le modèle collaboratif et participatif et donner à la sociabilité numérique une légitimité. C’est en favorisant l’agilité des gens avec le numérique que la francophonie peut améliorer la circulation des contenus francophones.


Les trois défis de la francophonie

En animant les deux panels durant la journée de jeudi, des intervenants m'ont fait remarquer qu’il existe d’autres défis. À part la visibilité des contenus francophones, j’en ai retenu deux.


Ces défis sont (1) la fracture numérique et (2) la conservation du patrimoine. Ils ont été évoqués durant le premier panel. Ce panel était organisé par l’Institut français et le Conseil des Arts et Lettres du Québec où des intervenants ont été invités à présenter leurs expériences, leurs visions et leurs pratiques en matière de coopération numérique. (voir mon billet précédent)

1- La fracture numérique



M. Pierre Ouédraogo, directeur de la Francophonie numérique à l’Organisation internationale de Francophonie, a rappelé qu’il existe des pans entiers de la société qui n’ont pas accès à Internet, notamment en Afrique. Or ce continent représentera la moitié de la francophonie au milieu du 21e siècle.


Comme le numérique s’insère maintenant partout dans la société, une fracture numérique annonce donc, aussi, comme une fracture dans la francophonie.

2- La conservation du patrimoine.

Le patrimoine est souvent considéré comme tel quand «il a survécu à l’oubli» (pour reprendre la belle image de M. Doueihi sur le panel). Or aujourd’hui la technologie nous a volé le besoin de faire appel à notre mémoire. C’est elle qui décide ce qui est conservé.

M. Doueihi appelle ça la blessure numérique. Nous nous sommes fait spolier une partie de nos compétences. Il ajoute ensuite qu'il ne nous reste alors plus que la «possibilité d’oublier». Oublier est une autre façon de dire qu’il faut faire des choix pour trier et sélectionner.


La francophonie a un besoin urgent de «plateformeurs»*

(*MàJ: J'ai modifié l'intertitre pour reprendre l'expression de Bruno Boutot)


La conclusion concernant le patrimoine me semble être un des beaux effets concrets du Forum.

Les élites des institutions, en haut, ont une conception classique du patrimoine (« c’est ce qui a survécu à l’oubli ») et se voient confronté à cette énorme masse de contenu qui se créée spontanément partout en ligne.Beaucoup de projets en ligne sont développés et portés à bout de bras par des francophones, bénévoles et entrepreneurs, fiers et passionnés, exsangues, mais batailleurs.


Tous des projets et contenus produits par la base. Or il ne leur manque que le financement pour continuer. 


Mais les structures de financement des institutions comme la SODEQ ou le CALQ ne sont pas encore structurées pour répondre à une culture numérique qui ne remplit pas les critères industriels traditionnels.

À la fin de la journée, M. Gauthier, directeur général du CALQ est venu dire un mot de la fin. Il a clairement été impressionné par le courage et l'ingéniosité de projets (voir la liste sur mon précédent billet) qu'il a vu. 

Il a créé le joli terme "plateformeur" pour identifier ces gens qui crée des plateformes, structurantes et collaboratives, qui permettent de relier les gens, les artistes, ensemble. 

Il a reconnu que sa structure de financement n'est pas réellement adaptée pour les accueillir, mais qu'à partir de maintenant il allait voir comment son organisme pourrait leur faire une place.

Juste pour avoir entendu ça, ce premier Forum mondial de la langue française avait un sens.

Animation au Forum mondial de la langue française

Je vais animer deux tables rondes ce jeudi (5 juillet 2012), dans le cadre du premier Forum mondial de la langue française (#fmlf2012) qui se déroule à Québec toute cette semaine.



L'Organisation internationale de la francophonie offre à des centaines de participants francophones de la société civile des échanges et des réflexions portant sur les enjeux relatifs à la place et à l’avenir du français.

Un des quatre grands thèmes du Forum est le « nouvel univers numérique » qui sera débattu durant une journée complète, le 5 juillet prochain (lire mon billet sur Triplex)

Dans ce cadre, l'Institut français et le Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ) proposent le Rendez-vous numérique des cultures de la Francophonie, qui se décline en deux activités que j'ai l'honneur d'animer.
En avant-midi : une table ronde qui vise à brosser un portrait des projets de coopération numérique dans les milieux culturels de la francophonie.
En après-midi : des organismes de la francophonie sont invités à faire connaître des projets visant à créer, diffuser ou partager des contenus culturels francophones en ligne.


1) Table ronde en avant-midi
« Paysages numériques des cultures de la Francophonie » 


De grands panellistes ont été invités à présenter leurs expériences, leurs visions, leurs pratiques en matière de coopération numérique pour favoriser les échanges culturels entre les communautés francophones.

Pierre Ouédraogo, directeur de la Francophonie numérique à l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Il est considéré comme le père de l'Internet au Burkina. Il montrera comment les biens communs de la société de l'information peuvent apporter un début de réponse à cette problématique.

Milad Doueihi, titulaire de la Chaire de recherche sur les cultures numériques à l'Université Laval de Québec. Il a publié deux ouvrages soit La Grande Conversion numérique en 2009 et Pour un humanisme numérique en 2011. C'est lui qui donne la grande conférence qui ouvre la journée du numérique

Uros Petrevski, designer chez Nodesignlab, qui vient présenter entre FabWall, le premier papier peint de réalité augmentée.

Luc Courchesne, artiste en arts numériques de renommée internationale, membre fondateur de la Société des arts technologiques (SAT) et professeur à l'École de design industriel de l'Université de Montréal.

Simon Villeneuve, enseignant et contributeur à Wikipédia, très actif au sein du Comité Québec de Wikimédia.




2) Table ronde en après-midi
« Babillard numérique » 

Une table ronde de présentation de projets numériques de collaboration en arts et en culture. Les représentants des organismes porteurs de projets numériques seront là pour parler de leur projet, site ou plateforme.

 ifverso.com,  présenté par Annick Lederlé. IF Verso est une plateforme numérique qui offre à la fois une base de données de titres français traduits en langues étrangères et un espace réseau collaboratif destiné aux membres du réseau culturel français et aux professionnels du livre en France et à lʼétranger.

nt2.uqam.ca, présenté par Alice van der Klei. Nouvelles technologies, Nouvelles Textualités est un laboratoire qui sʼintéresse aux nouvelles formes de textes et dʼœuvres hypermédiatiques.

Teatricus.com, présenté par Simon Gauthier, son fondateur. Teatricus soutient lʼaction des acteurs du milieu des arts et de la culture en proposant aux diffuseurs, aux producteurs et aux artistes de toutes les disciplines des outils numériques pour faciliter leur développement professionnel.

Vitheque.com, présenté par Jason Paré. Vithèque est une plateforme en ligne qui donne accès à des documents vidéographiques, comme des essais, des documentaires, des fictions ou des vidéos dʼart, réalisés par des artistes indépendants.

Airelibre.tv, présenté par Simon Paradis. Airelibre.tv est une webtélé pour la littérature, les arts visuels et les arts de la scène.

Ci-diguente.net, présenté par Marion Louisgrand Sylla, La plateforme collaborative Ci-Diguente a été développée pour encourager le partage de ressources et de connaissances en lien avec lʼart et la technologie et relie lʼAfrique et les Caraïbes.

(Addendum: voir mon bilan ici)


Mes billets publiés sur Triplex en juin 2012

Voici mes 6 billets écrits sur mon autre blogue, Triplex, le blogue techno de Radio-Canada, le mois dernier. J'y suis d'un peu plus près l'actualité techno, tout en privilégiant tout de même les nouvelles qui ont des impacts sur la société. 

Durant ce mois de juin, j'ai touché l'Open Data, l'informatique quantique et fait un peu un retour vers le futur en comparant l'environnement informatique d'il y a 20 ans avec celui d'aujourd'hui.

Triplex 

Données ouvertes : la méthode Obama (4 juin 2012)
On savait déjà que le président américain, Barack Obama, avait ordonné l’an passé à toutes les agences fédérales qui ont un lien direct avec le public d’améliorer leurs services à l’aide des nouvelles technologies. Voilà qu’en mai, le président a haussé le ton en exigeant que toutes les agences fédérales mettent en place des interfaces de programmation (API).


Les pires mots de passe piratés sur LinkedIn (7 juin 2012)
Quand Linkedin s'est fait pirater en début juin, la liste des mots de passe s'est retrouvée sur le web. LeakedIn.org (notez le beau jeu de mots entre Linked et Leaked) possède une copie de ces mots. Et il semble que bien du monde utilise des mots de passe très peu fiable.


La fin du pixel (12 juin)
Sur la sortie du nouveau MacBook pro 15 pouces avec écran Rétina et sa densité de 220 pixels, une densité de pixels supérieure qui rend le pixel imperceptible pour un oeil humain.

Le qubit qui vivait plus d’une seconde sur un diamant (15 juin)
Cette seconde peut vous sembler courte, mais elle est primordiale pour les ordinateurs quantiques pour effectuer des calculs complexes et est essentielle pour les répéteurs quantiques qui seront à la base du réseau de communication inviolable de demain. Avec un ordinateur quantique, il  sera possible de faire des simulations avec des quantités astronomiques de données en un temps record.

Flame : cyberespionnage et guerre virale dans votre salon (20 juin)
Flame a été identifié en juin et il est le puissant et le plus complexe virus informatique. Il s’infiltre sans se faire détecter, en changeant sa « signature », et possédant ses propres librairies de codes et son propre serveur intégré. Il semble acquis que ce soit une oeuvre conjointe d'Israël et des États-Unis.

Rio+20 : nous vivons dans leur futur! (22 juin)
Alors qu’en 1992, on ne comptait que quelques serveurs en Europe et que le web n’était pas accessible sur des micro-ordinateurs, aujourd’hui, nous pouvons converser avec FaceTime sur un iPad partout où il y a du WiFi, et ce, sans même savoir programmer. Mais il devient pressant de clarifier cette question pour l’avenir : le tout-Internet est-il durable?

Francophonie : la grande conversion numérique (29 juin)
La grande conversion numérique, c’est la « remise en cause fon­da­men­tale et pro­fonde de tous les éléments cons­ti­tu­tifs d’une vision du monde ». Le numé­ri­que est essentiellement un pro­ces­sus qui contribue à l’émergence d’une nou­velle culture. Les discussions tourneront autour de la langue française comme vectrice d’innovation et de créativité dans ce monde virtuel. Sera-t-elle à la hauteur?

Le cul-de-sac des étagères infinies

À la question posée à Colin L. Powell, l'ancien secrétaire d'État sous Bush fils, dans le Book Review du NYTimes d'aujourd'hui ("quel est le prochain livre que vous allez lire"), il répond:
«"Sigh". C'est ça le problème. Je n'arrête pas de télécharger de nouveaux livres sur ma liseuse, et je n'arrive pas à me décider lequel lire. Le désir d'acquérir des livres électroniques se fait tellement de façon impulsive, instinctive, que je ne sais plus à la fin ce qui se trouve sur mes étagères électroniques (e-shelfs). Et quand je regarde, j'y vois des titres que je ne reconnais même pas, ou du moins dont je ne me rappelle ni avoir voulu ou ni avoir acheté» (dimanche 1 juillet 2012, page 8)
Dans un monde de surabondance, notre rapport aux objets change. Avec la surabondance de ebooks, c'est toute notre relation avec les livres qui est aussi chamboulée...

Je ne parle pas directement de la valeur économique, mais de la valeur perçue d'un livre qui se trouve sur les étagères infinies de nos Kindle, Gobo, iBooks, Google Play...

La possibilité de rajouter rapidement, facilement, à faible coût, des livrels sur nos étagères infinies n'est pas nécessairement une bonne chose sur le long terme.


Trop de choix paralyse

Il me semble que la métaphore des étagères de bibliothèque pour conserver ses livres ne tiendra pas la route encore longtemps. Je m'attends à ce qu'y ait une percée de ce côté pour "stocker" intelligemment nos livres électroniques. Les faire tenir sur une étagère infinie est un cul-de-sac dans un monde de surabondance...

Davantage de métadonnées doivent être conservées sur les livres qu'on achète : date, après quel type de recherche, l'ordre des achats, qui me l'a recommandé, quel est le bout de texte ou l'ami qui m'a donné le goût de l'acheter, où mes amis sont rendus à lire ce livre, classement par popularité de téléchargement de mon réseau ou de la plateforme, annotations sur le livre lui-même (et juste dans le livre), classement par thème de l'actualité (mots clés), etc...

Si un livre possède un attrait quand il est trouvé dans un certain contexte de promotion (pubs, recommandations automatiques, filtrage social), ce contexte disparaît complètement sur nos étagères personnelles.

Un algorithme pourrait établir une forme de présentation éditoriale de nos livres non lues à même notre collection.

Qu'y a-t-il de moins d'excitant que de parcourir une simple liste infinie de livres qu'on a déjà pensé avoir voulu lire...